Eureka ! Tu es enfin sorti de ta "zone de confort" ! Il était temps… !

La question que nous pourrions nous poser : Est-il sage de quitter cette zone, telle qu'elle nous est présentée dans ce récit, si nous y sommes invités ?

L'origine de la zone de confort

Elle semble remonter au livre "Qui a volé mon fromage ?" de Spencer Johnson, qui est rapidement devenu un incontournable [...] dans le monde du management.

Etonnant [...] que "tout le monde" semble avoir pris goût à ce récit. Ou peut-être pas tant que ça, dans un monde où le taylorisme (la subordination omniprésente) est encore très présent.

La métaphore de la zone de confort

Alors qu'au fond tout le monde peut l'appliquer, force est de constater (sans surprise) que le concept - de la "fameuse" zone magique qu'il suffit de quitter pour accomplir de grandes choses - est généralement largement utilisé par ceux qui font autorité [...].

Ils le font pour juger les autres à l'aide d'un modèle mental qui associe l'appel pressant à sortir de cette zone pour "enfin" (à leurs yeux) innover (changer) - ou simplement atteindre les objectifs attendus.

Un récit dans lequel le langage visuel est révélateur

Dans cette vidéo : Who Moved My Cheese (en anglais, mais facile à comprendre), les humains sont assimilés sans détour à des souris. Ces derniers sont censés représenter les "petites gens" incapables de se déplacer, ce qui les réduit à une vie de "souris" dans un labyrinthe créé par les autorités (société, entreprise, etc.).

Pour (sur)vivre, ils doivent chaque jour traverser le labyrinthe, dans lequel une "puissance supérieure" a apparemment placé des fromages au hasard, permettant aux plus actifs de trouver de quoi manger - toutefois, une menace prémonitoire résonne également dans le lieu, disant : adapte-toi ou tu disparaîtras !

On critique également, en guise d'avertissement, le fait que les "petites gens", qui sont exposés au changement, s'adaptent trop lentement et sans joie aux changements demandés - cela leur pend pourtant au nez : s'ils restent constamment dans leur zone de confort, ils mourront inévitablement de faim !

En réalité, ce n'est rien d'autre qu'un concept mental

Utile pour éviter d'avoir à affronter la complexité d'une situation de changement organisationnel ou intrapersonnel.

Cela explique peut-être pourquoi un livre aussi mauvais a pu devenir un best-seller mondial et pourquoi il correspond si bien à l'état d'esprit dominant des "managers minute" qui diffusent ce livre et son contenu (jusqu'à aujourd'hui...).

Ceci parce qu'ils préfèrent occulter les motivations individuelles, barrant ainsi la route à une approche holistique du changement qui pourrait leur faire perdre leur position dominante et leur contrôle.

“La zone de confort, lorsqu’elle est attribuée aux autres, est antidémocratique et méprisante. Elle est un mensonge utilisé par les autorités pour condamner ce qu’elles sont incapables de contrôler !”
 

Une métaphore inquiétante

Certes, nous pouvons admettre que notre vie en tant qu'être humain sur cette terre est déjà, dans une certaine mesure, exactement comme le décrit la métaphore. Nous sommes soumis aux aléas et devons toujours et rapidement nous adapter aux circonstances changeantes, sous peine de disparaître.

Si nous transposons cette métaphore dans le contexte des entreprises, elle devient encore plus inquiétante, car elle suggère un modèle de pensée paternaliste qui laisse peu de place au développement de l'individu.

Une subordination malsaine

L'auteur lui-même admet d'ailleurs volontiers cette subordination, sans en faire mystère. Dans l'annexe, il est dit ouvertement que le changement dans l'entreprise serait bien plus facile si les "petites gens" s'adaptaient - s'impliquaient - davantage aux changements permanents.

Ce fait est encore plus évident dans la parenthèse du livre, qui décrit un groupe d'amis discutant de leurs défis actuels.

Il est frappant de constater que ce sont principalement "les autres" qui refusent de sortir de leur zone de confort, ce qui rend les choses infiniment plus difficiles.

Certes, il est également question de sa propre inertie face au changement, mais le ton reste majoritairement celui du reproche.

Les autres sont responsables

La responsabilité de la volonté de changement est ainsi transférée de l'autorité aux "autres", tout en conservant le droit de juger.

L'attribution qui en résulte pour une personne devient ainsi contraignante : "Cette personne ne sort pas de sa zone de confort. Elle est problématique".

Ainsi, les personnes qui refusent de se conformer volontairement à une attente de changement arbitraire qu'elles ne comprennent pas ou à laquelle elles ne veulent pas participer sont systématiquement mises à l'écart - alors qu'elles agissent intelligemment et qu'il est en fait déplacé de leur en faire le reproche ... et pourtant, la réalité est souvent différente.

Avec cette présentation et dans la réalité, le livre dévoile clairement l'arnaque et montre que la zone de confort est introduite comme un concept avec une logique de soumission obligatoire. L'objectif : débusquer les personnes qui refusent de s'adapter aux changements induits par les autres.

C’est ce qui me fait dire…

Qu'il est temps de ne plus considérer le changement dans les entreprises comme une initiative dirigée de manière centralisée, mais d'ouvrir ce processus à une réflexion collective capable de faire évoluer l'ensemble de l'environnement concerné par les décisions.

Si vous voulez faire la différence, c’est un pas qui va y contribuer.